Alors qu’Hollywood subit les conséquences de la grève des scénaristes et acteurs, le communiqué de presse du syndicat SAG-AFTRA laisse entendre que les éditeurs de jeux vidéo sont dans leur ligne de mire…
Cela fait maintenant cinq mois qu’un mouvement de grève sans précédent secoue le monde d’Hollywood, ralliant près de 11 000 scénaristes parmi lesquels figurent de nombreux indépendants, unis dans leur demande d’augmentations de salaire et de l’amélioration de leur sécurité professionnelle. Effectivement, cette mobilisation découle de l’élargissement inquiétant de l’écart entre les bénéfices colossaux des studios (39%) et ceux des scénaristes (4%) au cours de la dernière décennie. Au fil du temps, le mouvement a pris de l’ampleur au point que les acteurs ont décidé de se joindre à la cause en juillet 2023.
Les conséquences se manifestent par des retards de productions comme celui de Mission impossible : Dead Reckoning, part 2. Brad Pitt, actuellement au cœur de son prochain long métrage sur la Formule 1 nommé Apex, a mis en pause son tournage en guise de solidarité. Vous l’aurez compris, cette grève n’est définitivement pas prête de s’arrêter. Mais avec le dernier communiqué de presse du syndicat SAG-AFTRA, le monde du jeu vidéo pourrait aussi en subir les vagues.
Une grève au sein de l’industrie vidéoludique ?
Une petite mise en contexte s’impose. En 2017, un accord sur les médias interactifs (jeux vidéo) a été signé pour une durée initiale de trois ans. Néanmoins, ce dernier a d’abord été prolongé jusqu’en 2022 avant de l’être à nouveau pour 2024. La présidente de la SAG-AFTRA Fran Drescher déplore « l’impasse » dans lequel les négociations se trouvent dues à la « cupidité des employeurs ». Pour rappel, les enjeux principaux sont de garantir aux acteurs en motion capture et aux doubleurs de jeux vidéo une augmentation de salaire, une régulation de l’usage de l’intelligence artificielle ainsi qu’une meilleure sécurité professionnelle.
C’est reparti ! Maintenant, notre accord interactif (de jeu vidéo) est également dans une impasse. Une fois de plus, nous sommes confrontés à la cupidité des employeurs. Une fois de plus, l’intelligence artificielle met nos membres en danger et réduit leurs chances de travailler. […] La maladie de la cupidité se propage comme une traînée de poudre, prête à priver les travailleurs de leurs moyens de subsistance et les humains de leur utilité. Chez SAG-AFTRA, nous disons NON ! Pas sous notre surveillance !
À la vue de la situation, le Conseil d’Administration du syndicat représentant les acteurs et figurants a proposé un vote sur une autorisation de grève dans ce domaine. Le tout en vue d’une renégociation de ces accords prévue au 26 septembre 2023. Toujours avec les mêmes revendications, il faut savoir que cette potentielle autorisation n’est pas forcément synonyme de grève. En revanche, elle leur donnera un levier conséquent pour obtenir des termes de contrat plus équitables : une épée de Damoclès au-dessus des décisionnaires.
En cas de discussions infructueuses, les signataires de l’accord de 2017 dont Activision, Insomniac Games, Electronic Arts, Epic Games, Take Two, ou encore Warner Bros Games font partie (pour ne citer qu’eux) pourraient être impactés si grève il y a. Ainsi, nous pouvons nous demander si des jeux attendus comme Marvel’s Spider-Man 2 ou Call of Duty : Modern Warfare III (2023) ne sont pas à l’abri d’un hypothétique report. Tout comme un potentiel retard sur les contenus additionnels prévus par Mortal Kombat 1.
Hollywood et jeux vidéo : même combat face à l’IA
Cette convergence d’Hollywood et du monde du jeu vidéo permet de placer l’accent sur un problème : l’utilisation de l’IA. Cette dernière pourrait mettre en péril l’avenir professionnel des membres de la SAG-AFTRA si son usage n’est pas régulé. Il y a peu, le média NPR révélait le témoignage de figurants pour la série Wanda Vision sur Disney +. Alexandria Rubalcaba, qui en fait partie, déclare qu’il leur avait été demandé de se soumettre à des scans corporels afin de créer leur réplique numérique.
Même si elle a été payée pour cette journée dédiée à cela, elle exprime des inquiétudes : « Je crains que l’IA finisse par éliminer les figurants de fond. Ils n’auront plus besoin de nous. » En effet, la manière dont ces répliques seront exploitées par Disney dans d’autres productions et à l’avenir restent assez floues, tandis que les personnes qui ont refusé de s’y présenter redoutent d’être boycottées par les studios. L’un des axes de la grève réside donc dans la mise en place de négociations systématiques à chaque usage de leur image.
Plus récemment, PC Gamer nous rappelait les propos tenus par Elias Toufexis, doubleur d’Adam Jensen dans Deux Ex ou encore Sam Coe dans Starfield. Ce dernier partageait ses inquiétudes auprès du site, dans la mesure où il fait énormément de performance en motion capture. De ce fait, il a remarqué que sa prestation a été réutilisée dans un autre jeu, avant de recevoir un chèque, mais aucun crédit…
Le vote des membres du syndicat SAG-AFTRA aura lieu du 5 au 25 septembre 2023. Cette situation sera à suivre de très près, tout comme celle concernant le monde d’Hollywood…